Toute thérapie contient une part de placebo : c’est la conclusion des dernières études sur cet effet longtemps cantonné au rôle d’accompagnement antidouleur. Aujourd’hui, une nouvelle vision de la médecine place la relation corps-cerveau au cœur du traitement.

C’est une bombe qui a été lâchée cette année dans « The Lancet », la plus sérieuse des revues médicales internationales : « Nous démontrons que les effets placebo existent dans n’importe quel traitement de la médecine courante, et ce même si aucun placebo n’a été prescrit. Ces effets ont le potentiel de rendre les traitements plus efficaces. » Toute guérison serait-elle placebo ? Certainement, au moins en partie, répond ainsi le chercheur Damien G. Finniss, du Pain Management Research Institute de l’Université de Sydney. Le Dr Finniss va plus loin dans son étude en soutenant, non seulement que les effets placebo constituent de véritables « événements psychobiologiques », mais surtout qu’il n’existe pas un mais plusieurs effets placebo, différents selon le patient et le contexte thérapeutique. Parmi eux, la confiance que le patient accorde à son médecin dont il démontre qu’elle a, par elle-même, un effet sur le processus de guérison.

L’esprit est donc un médicament, mais n’est-ce pas ce qu’avait déjà constaté le journaliste américain Norman Cousins qui, dans les années 1970, s’étant soigné par le rire d’une maladie chronique dégénérative, avançait que « la conviction devient biologie » ? En somme, ce « mensonge qui guérit », selon le bon mot d’Anne Harrington, spécialiste de l’histoire de la science à Harvard, n’a rien d’une intox. Ni d’un remède miracle. Prudent, Damien Finniss conclut son étude sur la nécessité de poursuivre les recherches, avec l’espoir avoué de changer la vision de l’effet placebo et d’en décupler les effets, « en maximisant les facteurs qui induisent l’effet placebo dans les thérapies classiques. Ce serait une alternative prometteuse au fait de donner des placebos dans le seul but de susciter l’effet placebo. »

hypnose et placeboAvec le placebo, tout joue : l’espoir du patient, la personnalité du prescripteur, son optimisme, l’effet d’annonce… De fait, cela fait longtemps que le corps médical reconnaît les vertus des placebos, tant subjectives que neurologiques, notamment dans les cas de stress, d’anxiété, de dépression et même dans le traitement de la maladie de Parkinson. Aux Etats-Unis, 45 % des médecins hospitaliers en prescrivent à leurs patients, selon l’étude de Rachel Sherman, étudiante en médecine à l’université de Chicago, publiée dans le « Journal of General Internal Medicine » en janvier 2008. En France, en 2001, Jean-Jacques Aulas, psychiatre au CHU de Saint-Etienne, demandait une autorisation de mise sur le marché d’un élixir psychoactif de sa composition, le Lobepac Fort (anagramme de placebo). Il n’en vendra que cinq cents flacons, mais le docteur a réussi son coup : donner un coup de projecteur sur les placebos.

En somme, l’ordonnance soigne tout autant que le médicament. L’espoir en guise de comprimé, comment cela peut-il guérir ? Le placebo est une substance sans activité pharmacologique, utilisée soit comme témoin lors d’essais thérapeutiques, soit comme traitement, et qui influe sur le psychosomatisme créant, ou non, les conditions de la guérison. Le processus ? L’espoir génère spontanément la production d’endomorphine – ou opoïdes endogènes, c’est-à-dire calmantes – internes à l’organisme. Loin du cliché des boules de sucre utilisées en homéopathie, le placebo n’est pas forcément un médicament, il peut s’agir d’une intervention chirurgicale inadaptée ou mal conduite, mais qui produira des effets positifs. En résumé, l’autosuggestion appliquée à la médecine. L’essentiel serait d’y croire. Ou d’avoir la foi. En octobre 2009, la revue scientifique « New England Journal of Medicine » posait cette question : les médecins devraient-ils prescrire des activités religieuses ? La revue se basait sur nombre d’études démontrant l’effet positif de la prière sur la santé. N’en déplaise aux croyants, il ne s’agit pas d’une opération du Saint-Esprit, mais de l’esprit tout court…

Pourquoi l'hypnose fascine yoan mryoL’hypnose, elle, se base sur les vertus curatives du cerveau. Mais pour la « mère des thérapies de l’âme », l’effet placebo n’est qu’un ressort parmi tant d’autres, comme le souligne le pyschothérapeute Victor Simon : « Le premier placebo, c’est la consultation. Dès qu’un patient prend rendez-vous avec un docteur, il met déjà en route un processus de mieux-être car il sait qu’on va s’occuper de lui. Le deuxième placebo réside dans la capacité du patient à se sentir compris par son médecin. »

Vieille comme le monde, l’hypnose a longtemps été moquée, voire taxée de manipulation mentale. Les Occidentaux observaient, circonspects, les transes de guérison des Gnawas du Maroc ou des Amérindiens et toisaient les peuples qui, face à la maladie, s’en remettaient aux mains du chaman, le prêtre-guérisseur. Pourtant, à l’image de l’hypnose qui utilise la parole, ces danses placent le sujet dans un état de transe permettant d’ouvrir les portes de son inconscient. Introduite en France au xviiie siècle par le médecin allemand Franz Anton Mesmer, l’hypnose va véritablement exploser deux siècles plus tard sous l’impulsion du psychiatre américain Milton Erickson. « Une approche révolutionnaire », s’enthousiasme Victor Simon, ancien gastro-entérologue qui s’est tourné vers la médecine psychosomatique : « L’hypnose ericksonienne, contrairement à celle de Freud et de Charcot, ne fait pas de suggestion de guérison, mais guide le patient pour qu’il trouve lui-même, dans son inconscient, ses propres ressources de défense. Bref, dans le long rallye de la guérison, le patient est son propre pilote, le thérapeute son copilote. »

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« Guérir le stress, l’anxiété, la dépression sans médicaments, ni psychanalyse »
« Du bon usage de l’hypnose : A la découverte d’une thérapeuique incomparable »
« Placebo. Chronique d’un élixir psycho-actif » de Jean-Jacques Aulas

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